Le tribunal correctionnel pour mineurs : le choix de la déconstruction d’une justice adaptée à l’enfance

Dans le cadre du premier tribunal correctionnel pour enfants à Paris, une conférence de presse s’est tenue le 6 avril 2012 pour dénoncer la déspécialisation de la justice des mineurs. L’association s’est jointe à ce mouvement et voici sa position.

L’acharnement législatif contre une justice des mineurs spécialisée n’y change rien : la délinquance juvénile se distingue de celle des majeurs. De ce fait, elle appelle un traitement différent pour être durablement utile. L’entrée en vigueur du tribunal correctionnel des mineurs est l’une des expressions de ce déni de réalité.

Le tribunal correctionnel des mineurs cherche à aligner le droit pénal des mineurs sur celui des majeurs. L’adolescent est jugé par un tribunal non spécialisé qui ne le connaît pas. La priorité est portée sur l’acte commis, au risque d’éluder la personnalité du mineur et d’occulter ce qui est utile et efficace pour l’adolescent et la société au sein de laquelle il vit : sa réinsertion durable.

Le juge des enfants, clé de voûte de la justice des mineurs, garant de la cohérence et de la continuité du parcours judiciaire de l’adolescent, est marginalisé et dépouillé de la procédure qui fait sa force. Minoritaire dans la composition du tribunal correctionnel pour mineurs, il devient une caution formelle et ne garantit pas une approche spécialisée.

Les adolescents les plus difficiles, ceux qui requièrent la plus grande vigilance, ne bénéficieront plus des ressorts d’une justice pourtant conçue pour eux. Le traitement judiciaire sacrifie le sur-mesure et la recherche de progression au culte du systématisme et de la progressivité. C’est ainsi, qu’un jeune homme de 16 ans est cité devant le tribunal correctionnel pour mineurs suite à un vol de préservatif pour lequel il encourt une peine-plancher !

Le tribunal correctionnel des mineurs est issu de la loi du 11 août 2011 consacrée à « La participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et au jugement des mineurs » Paradoxalement, la loi écarte les citoyens, assesseurs auprès du tribunal pour enfants, du jugement des mineurs les plus difficiles ! Les assesseurs, issus de la société civile et intéressés aux questions de l’enfance en difficulté composent depuis 1945 le tribunal pour enfants présidé par un juge des enfants mais sont exclus de la nouvelle juridiction.

A contre-courant de cette législation régressive il faut :

-* Abolir le tribunal correctionnel des mineurs et les peines-plancher,

-* Renforcer la prévention aujourd’hui affaiblie,

-* Reconstruire une justice réactive et apaisée par une confrontation rapide du mineur auteur d’un délit à son juge, une exécution sans délai des mesures éducatives et un jugement au moment juste : suffisamment long pour sanctionner l’évolution d’un parcours éducatif, suffisamment court pour éviter les temps morts d’une justice débordée,

-* Revaloriser la fonction éducative et déployer un panel de mesures éducatives diversifiées.

En 1912, la première juridiction spécialisée pour les mineurs était inaugurée. 2012 ne doit pas en sonner le glas !